A lire par tous les amateurs de génétique équine, passionnés et praticiens de traction animale, défendeurs du patrimoine rural .

Vient de paraitre début 2023 :

Jean-Léo Dugast

 » L’épopée percheronne

Deux siècles d’illustrations et d’histoires¹… »

  Présentation par Emmanuel Rossier²

Passionné du Perche et du cheval percheron, Jean-Léo Dugast, photo-journaliste et grand voyageur, l’est depuis de nombreuses années et leur a déjà consacré plusieurs ouvrages, dont le volumineux « Le siècle d’or du cheval percheron : 1800-1900, du Perche à l’Amérique» (495 pages, paru en 2019 et aujourd’hui épuisé.) Mais son dernier ouvrage a ceci de particulier : il associe de courts textes extraits de journaux, lettres, catalogues et autres documents anciens et une fantastique iconographie de plus de 130 illustrations (photos, peintures, dessins, lithographies, etc.) Ils témoignent d’une constante évolution et adaptation de la race de chevaux percheronne au cours des temps et notamment des deux derniers siècles.

Cette histoire a sans doute commencé avec les postes et messageries à cheval qui transportaient hommes et courriers sur les routes de France depuis le 15 ème siècle. C’était alors des animaux « de petites tailles et robustes à l’effort », bien loin de l’image que nous en avons maintenant d’un gros cheval de trait lourd et gris pommelé ! On fait cependant remonter les commencements de la race percheronne au tout début du 19ème siècle et c’est au cours de ce siècle qu’il a connu un fantastique essor, notamment avec la création de la Société hippique percheronne de France (SHPF) et du stud book percheron dans les années 1880.

Ce que l’on sait moins, c’est le rôle décisif que les américains ont joué dans ce développement. Avec la « conquête de l’ouest », les besoins de chevaux puissants « de gros trait » pour travailler terres et prairies se sont vite fait sentir. Les chevaux percherons se sont imposés au détriment d’autres races européennes. Les premières importations ont eu lieu en 1831 et se sont considérablement accrues ensuite. Quelques éleveurs américains en ont été les promoteurs, à commencer par Mark W. Dunham, éleveur à Oaklawn Farm dans l’Illinois, qui fit son premier voyage dans le Perche en 1872 et importa plusieurs centaines de percherons par an. De nombreux acheteurs le suivirent, tels William Ellwood, James Mclaughlin, Frederick Pabst, Franck Iams, A.B. Holbert et bien d’autres, qui parcoururent et sillonnèrent le Perche en tout sens et fréquentèrent assidûment les concours pour acheter étalons, poulains et juments et les envoyer aux États-Unis et au Canada. La SHPF voit alors « un véritable danger au point de vue de la conservation de la race percheronne » dans cette hémorragie (3 200 exportations en 1910) et met en place une prime de conservation aux meilleurs étalons pour les maintenir dans le Perche.

Les crises économiques et financières, la première guerre mondiale de 1914-1918 mettront des freins temporaires à ces échanges avant qu’ils ne reprennent de plus belle, mais réorienteront le type de chevaux produits vers des animaux moins volumineux et d’une taille moyenne, orientation soutenue par l’administration des Haras.

Ce que l’on sait moins également est le rôle promotionnel pour les chevaux percherons joué par une grande peintre animalière, Rosa Bonheur. On connaît son célèbre tableau « Le marché aux chevaux » peint en 1853 et figurant plusieurs étalons percherons se cabrant ou ruant. Elle fit de très nombreux dessins et peintures de percherons, notamment des portraits de plusieurs étalons célèbres, dont Voltaire, importé aux États-Unis par Mark Dunham. L’exposition « Rosa Bonheur (1822-1899) » organisée par le Musée de Bordeaux puis le Musée d’Orsay en 2023 nous en a donné une merveilleuse illustration.

L’arrivée de la machine à vapeur et des tracteurs, la deuxième guerre mondiale entraîneront cependant le déclin du cheval de trait et particulièrement du cheval Percheron qui verra ses effectifs s’effondrer. Cette situation facilitera cependant la fusion des différentes races dites « voisines », trait du Maine, trait augeron, trait berrichon, trait nivernais avec le percheron. Cette fusion sera effective en 1966 avec la création de la nouvelle Société hippique percheronne. « Une ère nouvelle s’ouvre pour le cheval percheron », c’est par ces mots que Jean-Léo Dugast termine cet ouvrage.

Jean-Léo Dugast nous fait ainsi voyager dans plusieurs états américains et dans tous les recoins du Perche, de Mamers à Condé-sur-Sarthe, de Nogent-le-Rotrou à Mortagne, deux villes rivales réconciliées par l’entremise du Secrétaire de la Société percheronne américaine ! Il nous entraîne dans les fermes, les concours, les comices, chez les Aveline, Perriot, Bouthry, Tacheau, Chouanard, et autres éleveurs et étalonniers. Il nous emmène sur les attelages en paire, en ligne, à quatre, à six, des omnibus de Paris, de brasseurs, de pompiers, de ramassage de foin et de paille, de transport de grains, de grumes, de pierres, etc. illustrant les capacités d’adaptation du percheron, son bon caractère, sa docilité, sa puissance, ses allures. Il nous fait découvrir des étalons célèbres comme Brillant, Duroc, Voltaire, Cheri, Bésigue, Rhum, ainsi que Echo, Fronton ou Laet avec leur belle robe noire et tant d’autres.

Une très belle et passionnante « épopée percheronne », magnifiquement iconographiée.

¹ Éditions de L’Étrave, janvier 2023, 144 pages, ISBN : 978-2-35992-089-5, 30,00 € (livre relié)

² Ancien Directeur général adjoint des Haras nationaux et de l’Institut français du cheval et de l’équitation, membre de l’Académie d’agriculture de France .

La race percheronne est mise en valeur dans plusieurs musées d’agriculture dont entre autres:

l’Ecomusée du Perche qui organise chaque année mi aout un concours de la race,Écomusée du Perche (museesagriculture.fr) ,

l’espace muséographique du Haras du Pin et son importante collection de véhicules hippomobiles.